Dans un éditorial publié sur Project Syndicate, Abebe Aemro Selassie le directeur du Département Afrique au FMI scrute la situation du continent post Covid – 19.
Dans son analyse des effets du Covid – 19 sur les économies du continent, il fait ressortir plusieurs aspects. Au titre desquels, la question du financement de la riposte face à cette pandémie qui occupe une place de choix. ‘’Les gouvernements africains ont un besoin urgent de financements extérieurs supplémentaires pour les aider à atténuer l’impact économique de la pandémie. Et avec des taux d’intérêt mondiaux aussi bas qu’ils le sont actuellement, il est difficile de penser à un moment plus opportun pour prendre un tel engagement envers l’Afrique – ou un investissement plus important pour l’avenir de notre planète. Il est trop tôt pour dire quel sera le bilan humain et sanitaire de COVID-19 en Afrique subsaharienne. Mais le terrible impact économique de la pandémie sur la région est déjà clair’’.
L’autre pan développé est celui lié à l’impact économique de cette crise sur le continent. Fort de son expérience de près de 30 ans à travers l’Afrique subsaharienne, il fait savoir que « l’ampleur du défi économique qui se déroule actuellement ne ressemble à aucune autre pendant cette période ». Car, souligne-t-il, «La contraction économique attendue de la région cette année – avec un PIB qui devrait diminuer d’au moins 1,6% et de 4% en termes par habitant – sera sa plus forte depuis au moins 1970 », alerte-t-il.
Une menace si puissante pour la région
Pour le directeur du Département Afrique au FMI, plusieurs raisons indiquent que cette pandémie est une menace si puissante pour la région. Jetant un coup d’œil dans le passé, il rappelle que « les crises africaines précédentes, telles que celles résultant de catastrophes naturelles et de l’effondrement des prix des produits de base, ont toujours eu un impact différentiel sur ses économies. Mais aucun pays ne sera épargné par les retombées économiques du virus ».
Et outre, «Bien que la charge de morbidité due au COVID-19 dans certains pays africains soit restée jusqu’à présent limitée, cela est le résultat de mesures de confinement et d’atténuation agressives, allant des fermetures complètes aux fermetures de frontières. L’activité économique formelle a ainsi été brutalement réduite à tous les niveaux », poursuit-il.
Sous un autre aspect, il relève que «les pauvres subiront probablement le plus gros de la crise. Les personnes qui doivent sortir et gagner leur vie quotidiennement pour mettre de la nourriture sur la table pour leurs familles doivent désormais rester à la maison et pratiquer la distanciation sociale. Et peu d’entre eux pourront travailler à domicile ».
Par ailleurs, la détérioration importante de l’environnement extérieur aggravera l’impact de ces facteurs. En particulier, le resserrement des conditions financières et la forte baisse des prix des produits de base (en particulier pour le pétrole) qui aggraveront les défis auxquels sont confrontées de nombreuses économies.
Malheureusement, déplore enfin, «la capacité de la plupart des pays d’Afrique subsaharienne à monter quoi que ce soit s’approchant de la réponse budgétaire et monétaire nécessaire reste gravement limitée.». En effet, explique-t-il, «Beaucoup ont une dette publique élevée et une épargne intérieure limitée, et les options de financement extérieur privé se sont taries au moment où elles auraient le plus aidé ».
Les priorités
De l’avis du M. Afrique du FMI, face à la situation, la priorité essentielle pour les gouvernements est de protéger la santé et le bien-être de leurs citoyens. Cela nécessite d’augmenter les dépenses pour améliorer la préparation des systèmes de santé et de fournir des transferts ciblés en espèces ou en nature aux groupes les plus vulnérables.
Dans la mesure du possible, les gouvernements devraient également envisager d’étendre le soutien aux liquidités aux petites et moyennes entreprises pour assurer leur survie pendant cette période difficile. Cette assistance doit être fournie de manière transparente et conformément aux normes de gouvernance les plus élevées.
Mais, plus que jamais, les pays d’Afrique subsaharienne ont également besoin d’un financement extérieur à grande échelle. Le Fonds monétaire international et la Banque mondiale estiment que la région est confrontée à un déficit de financement public (en supposant une orientation budgétaire légèrement favorable) d’au moins 114 milliards de dollars en 2020.