Malgré une progression continue des crédits à l’économie dans les pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), on observe néanmoins que l’offre reste relativement faibles comparée aux pays émergents ou développés.
Dans la CEMAC, le ratio des crédits bancaires au secteur privé sur le PIB, qui traduit la profondeur financière, est en moyenne inférieur à 20% alors qu’il dépasse 160% en Chine et avoisine 100% en France. Selon la BEAC, les contraintes au développement du crédit dans la CEMAC sont accompagnées d’un coût prohibitif de ce dernier et de son rationnement. Ces contraintes sont expliquées par des facteurs provenant de l’offre de crédit, de la demande de crédit et des contraintes structurelles.
S’agissant des contraintes liées à l’offre de crédit, l’accroissement de l’offre de crédit des banques dans les économies africaines en général, et dans la CEMAC en particulier est limité par plusieurs facteurs, principalement : l’asymétrie et l’insuffisance des informations financières, économiques et juridiques sur les emprunteurs; l’étroitesse et le manque de profondeur du système financier ainsi que la faible diversification des produits financiers; l’atonie du marché interbancaire ; la structure inadaptée des ressources des établissements de crédit; la faiblesse des fonds propres des banques et l’insuffisance des capacités opérationnelles des établissements de crédit.
Asymétrie et l’insuffisance d’informations financières, économiques et juridiques limitent la capacité des banques à apprécier la signature des emprunteurs
Selon la BEAC, il est primordial que les banques disposent d’informations générales, économiques, financières et juridiques fiables sur les emprunteurs afin de prendre des risques maîtrisés. Or, l’environnement économique des pays africains reste dominé par d’importantes asymétries en matière d’information financière, comme l’illustre l’indice calculé par la Banque mondiale pour mesurer la profondeur de l’information relative au crédit.
Cet indice est en moyenne inférieur à 2 dans la CEMAC, alors qu’il se situe à 6 au Maroc, 7 en Afrique du Sud et 8 en France. La BEAC a engagé pour cela, un ensemble de réformes qui visent d’une part à redynamiser le marché interbancaire et d’autre part à fournir des informations financières fiables sur les emprunteurs (Centrale des bilans, Centrale des incidents de paiement, Bureaux de crédit).
L’étroitesse et le manque de profondeur du système financier, ainsi que la faible diversification des produits financiers, limitent la mobilisation efficace de l’épargne et empêchent une meilleure gestion des risques et une allocation optimale des ressources
Dans la CEMAC, le système financier reste dominé par le secteur bancaire, qui concentre en moyenne près de 80% des actifs financiers. Plus encore, le secteur bancaire est lui-même fortement concentré et, selon les pays, deux ou trois banques détiennent l’essentiel des actifs du secteur.
En ce qui concerne les autres composantes du système financier, l’apport des marchés financiers, quoique croissant, demeure marginal. Selon les données de la Banque mondiale, la capitalisation boursière avoisine 0,3% du PIB dans la CEMAC alors qu’il dépasse 200% en Afrique du Sud et représente environ 50% dans les pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.
De plus, cette offre de crédit bancaire n’est pas suffisamment diversifiée, se concentrant essentiellement sur des maturités courtes (55% dans la CEMAC).
L’atonie du marché interbancaire limite les possibilités de refinancement des banques et in fine leur capacité à couvrir les importants besoins de financement des économies de la CEMAC
Cet état de fait est lié, entre autres, à l’absence d’une culture de « solidarité de place » et à la crise de confiance qui a émergé dans les années 1990 en réaction à la crise économique ayant entraîné la faillite de plusieurs banques.
La structure des ressources des établissements de crédit, en majorité constituées des dépôts à vue (environ 79% des dépôts bancaires dans la CEMAC), demeure inadaptée pour leurs concours à moyen et long terme aux économies de la sous-région
Bon nombre de ces banques ne sont pas à même de répondre efficacement aux besoins de financement des investissements de certaines grandes entreprises en phase d’extension de leurs capacités de production. Cette situation contraint les banques à concentrer leurs emplois sur les engagements à court terme, moins risqués, au détriment des crédits à moyen et long terme, pourtant indispensables pour le financement d’une croissance économique durable. Conjuguée à la diversification limitée des produits financiers, la structure inadaptée des ressources bancaires traduit la difficulté globale de mobilisation de l’épargne longue aux fins de financement des investissements dans la CEMAC.
La faiblesse des fonds propres des banques limite leur capacité à octroyer des crédits
En général, plus l’établissement dispose de fonds propres, plus il peut octroyer de crédits. Malheureusement, plusieurs banques de la CEMAC se caractérisent par un faible niveau de leurs fonds propres, réduisant ainsi leur capacité à distribuer du crédit. Sur les dernières années, les données disponibles confirment la faiblesse des fonds propres nets des établissements de crédit, qui représentent en moyenne seulement 9% du total des ressources bancaires dans la CEMAC.
L’insuffisance de leurs capacités opérationnelles pénalise les établissements de crédit dans l’examen efficient de la fiabilité des projets
Certaines banques ne possèdent généralement pas de services spécialisés, dédiés à des clientèles spécifiques : petites et moyennes entreprises (PME), petites et moyennes industries (PMI), opérateurs agricoles, etc. Cet état de fait, qui n’est pas de nature à remédier à l’asymétrie d’information, ne favorise pas la capitalisation de l’expertise des banques et l’expansion de leurs engagements vis-à-vis des opérateurs aux profils spéciaux.