Scrutant la situation de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), l’institution financière française révèle que la pandémie de Covid‑19 a pesé sur l’intégration et la convergence économique de la sous-région.
En effet, note le rapport, les quatre principaux critères de convergence sous-régionales ont été miss à rude épreuve. Qu’il s’agisse du solde budgétaire de référence (déficit de référence inférieur à 1,5% du PIB), ou du taux d’inflation (3% maximum en moyenne annuelle), en passant par l’endettement public (dette publique inférieure à 70% du PIB) et la non‑accumulation d’arriérés de paiement intérieurs ou extérieurs au cours de la gestion courante.
Même s’il est bien vrai que faute d’un mécanisme de sanction des écarts éventuellement constatés, le cadre de surveillance multilatérale demeure à l’heure actuelle d’une efficacité modérée. Il convient néanmoins de noter que l’adoption d’un tel mécanisme de sanction est en cours. Il figure même parmi les recommandations émises lors de la cinquième réunion tripartite des États, des institutions de la CEMAC et des partenaires au développement, tenue le 21 mai 2021.
Face aux difficultés induites par la crise de la Covid‑19, la CEMAC a fait le choix de ne pas suspendre sa surveillance. Le respect de ces critères est apparu en recul en 2020. En moyenne, la CEMAC a continué d’observer deux critères sur quatre (ceux qui sont relatifs à l’inflation et à la dette publique).
Au niveau des États, en revanche, les retombées économiques et sociales de la pandémie ont pesé sur le respect de certains critères de convergence : dans deux pays (Guinée équatoriale et Tchad), l’inflation a dépassé en 2020, la norme des 3%, alors que ce critère était le seul unanimement respecté en 2019.
Dans le contexte de fragilisation des finances publiques, les normes en matière de solde budgétaire et de dette n’ont été tenues que par respectivement deux et quatre pays, contre quatre et cinq l’année précédente.
Comme en 2019, aucun des six États de la CEMAC n’a respecté le critère de non‑accumulation des arriérés publics. Le niveau de vie de la CEMAC, mesuré par le PIB par tête (à prix constants en dollars), a significativement reculé en 2020 (– 8,2%), y compris relativement au reste de l’ASS (– 4,2%). Tandis que les niveaux de vie du Cameroun et de la Centrafrique sont restés quasi inchangés (respectivement – 1 % et + 1,6 %), ceux du Congo, du Gabon et de la Guinée équatoriale (– 22,9%, – 12,9% et – 15,6%) ont fortement chuté. Le Tchad a quant à lui, connu une baisse davantage comparable à la moyenne des pays d’ASS (– 3,1%).
Sous l’effet de la baisse des prix du pétrole, la convergence des niveaux de vie entre les pays de la CEMAC s’est, de fait, améliorée, les pays avec les plus hauts niveaux de vie moyens (Guinée équatoriale, Gabon et Congo) ayant connu une dégradation plus forte que celle du reste de la CEMAC en 2020.
Malgré les objectifs de la CEMAC, les entraves à la libre circulation des personnes, des biens et des services sont restées importantes en 2020, dans un contexte de crise. La pandémie et les tensions sécuritaires ont aussi donné lieu à plusieurs fermetures de frontières, à l’instar du corridor Douala/Bangui ou des frontières terrestres de la Guinée équatoriale, toujours closes en juin 2021.
Quelques progrès ont toutefois été enregistrés, avec notamment l’adoption d’un règlement communautaire supprimant les frais d’itinérance des opérateurs de téléphonie mobile entre les six pays de la CEMAC au 1er janvier 2021, ou l’harmonisation des frais de titres de séjour.
La signature d’un « accord de coopération militaire pour la sécurité à la frontière commune » entre le Cameroun et la Guinée équatoriale, en juillet 2020, pourrait également être de nature à améliorer les échanges commerciaux tout en limitant davantage les trafics illégaux. L’intégration commerciale en CEMAC demeure très faible, avec un taux d’échanges intracommunautaires inférieur à 3% en 2020.
Si ce chiffre est, peut-être, sous‑estimé compte tenu de l’importance du commerce informel, les freins au commerce intracommunautaire sont nombreux : obstacles à la libre circulation, développement insuffisant des infrastructures, étroitesse des marchés, faible complémentarité des exportations, etc.
Les autorités communautaires et nationales poursuivent leurs réflexions en vue de la création d’une brigade douanière mixte inter‑États, qui pourrait contribuer à faciliter l’intégration commerciale au sein de la Communauté. Bien qu’encore limitée, l’intégration financière de la CEMAC enregistre des progrès.
En avril 2020, en réponse à la crise sanitaire, la BEAC a invité les prestataires de services de paiement à baisser les coûts de leurs opérations, tout en recommandant au public de privilégier les paiements par carte, téléphone mobile ou transfert dans leurs dépenses quotidiennes.
Le Groupement interbancaire monétique de l’Afrique centrale (GIMAC) a lancé en juillet de la même année, sous l’impulsion de la BEAC, une offre de services de monétique intégrale regroupés sur la plateforme Gimacpay : deux millions de transactions ont ainsi été réalisées entre juillet 2020 et février 2021, contre 3,5 millions entre 2015 et 2020.
La réaction à la crise sanitaire en matière de directives de santé publique a également été coordonnée à l’échelle de la CEMAC. Des experts de santé publique provenant des six États se sont réunis en janvier 2021, pour adopter une position commune sur la vaccination anti‑Covid‑19 ainsi que procéder à un partage d’expérience et un état des lieux de la situation de chaque pays. Cette démarche s’inscrit dans le cadre de l’Organisation de coordination pour la lutte contre les endémies en Afrique centrale (OCEAC), créée en 1963.