Olam et GSEZ traversent une zone de fortes turbulences au Gabon. En effet, entres ces entités et le Gabon, le climat ne semble plus au beau fixe. Il leur est notamment reproché un certain nombre d’incongruités : le non-respect des dispositions légales en ce qui concerne les droits des travailleurs, les dérapages sur le non-respect des normes de protection environnementale dans les sites d’exploitation agricole et forestière, et bien d’autres griefs qui ne vont dans le sens d’enjoliver leur image de marque. Les grèves déclenchées au lendemain du coup d’Etat du 30 août dernier ont été des cris de détresse en vue d’un mieux-être des travailleurs exerçant dans les différents sites agricoles et industriels de ces groupes.
Dans ce cadre, plusieurs organisations de la société civile gabonaise ont, dans une récente déclaration à Libreville, appelé à un urgent dialogue franc et sincère entre l’Etat gabonais et ces entités devenues les moteurs de la diversification de l’Economie et principaux porteurs d’Investissements directs étrangers (IDE) ces 15 dernières années au Gabon. La sortie de ces organisations s’inscrit donc, selon elles, dans le cadre de l’amélioration du climat des affaires, la lutte contre la corruption, la préservation des acquis, notamment les investissements et les emplois.
Ne pas confondre vitesse et précipitation
Certains experts en matière de développement appellent plutôt à une position médiane et équilibrée. Surtout dans un contexte où les autorités de la Transition sont en quête des partenaires et des investissements étrangers pour financer les projets. On le sait, ces deux entités ne sont pas un paradis sur terre. Néanmoins, ils sont aujourd’hui devenus les mammouths de l’économie gabonaise avec près 35 000 emplois créés avec des très importants investissements dans le pays.
L’objectif du dialogue sollicité devrait donc en priorité préserver les emplois existants, poursuivre les investissements et donc créer de nouveaux emplois pour lutter contre le chômage endémique des jeunes gabonais. En outre, ils espèrent que ce dialogue franc entre l’Etat et ces deux partenaires permettra de poursuivre et de consolider la politique de diversification de l’économie gabonaise et encourager les autres investisseurs à suivre le chemin ouvert par ces investisseurs.
Ce dialogue devra aussi viser la revalorisation des participations de l’Etat dans les différentes entités. Il s’agira notamment de revisiter les différentes conventions, améliorer le climat de collaboration et renforcer l’esprit gagnant-gagnant. Ce dialogue devrait également permettre de faire la promotion de la préférence nationale dans l’acquisition des contrats de sous-traitance, l’amélioration significative des conditions de travail des employés dans le respect des dispositions législatives en vigueur, la lutte contre l’esclavage moderne et toute forme de discrimination, l’organisation d’un audit social aux fins de parvenir à un diagnostic global des problématiques et questions critiques concernant les violations des droits humains, notamment les droits socio-économiques.
Etablir les responsabilités
Donnant son point de vue à la question, l’ingénieur agronome et coordinateur des activités de l’ONG IDRC Africa, Hervais Omva estime quant à lui que « Le Groupe Olam et Arise ont créé en 14 ans plus d’emplois que n’importe quelle autre entreprise ici au Gabon”. Il ajoute en affirmant que ces investisseurs ont prouvé ces 14 dernières années tout ce qu’ils étaient capables de faire. « Je considère que s’il y a des manquements, il faudrait préalablement se poser la question de savoir si ceux-ci relèvent du gouvernement antérieur ou de l’investisseur. Pour ma part, s’il y a des manquements, ils relèvent plutôt des gouvernements antérieurs. Avant de faire la chasse à Olam ou Arise, il est important que l’actuel gouvernement ou le CTRI convoque les différents ministres qui ont géré ces différents dossiers. À quelque chose près, dans les différents ministères, ce sont les mêmes fonctionnaires qui sont encore là. Ce sont les mêmes chargés d’études qui étaient conseillers ou directeurs généraux, et qui sont encore là. Donc, il est important que l’on convoque ces gens, et ce d’autant que nombreux sont ceux qui sont encore aux affaires, qui ont été reconduits par le CTRI et certains sont encore conseillers du président de la Transition ».
En 14 ans Olam et Arise ont créé plus d’emplois et ont ouvert les portes de l’industrialisation au Gabon
Dans son argumentaire, Hervais Omva déclare qu’il appartient au gouvernement actuel de convoquer l’ensemble des acteurs pour discuter. Faire le point et voir ce qui n’a pas marché pour qu’éventuellement l’on arrange, et voir ce qui a marché pour que nous pouvons continuer dans ce sens. Telle est la démarche à suivre. « Je fais partie de cette société civile qui dit “non, attention !”. Le Groupe Olam et Arise en 14 ans ont créé plus d’emplois et ont ouvert les portes de l’industrialisation au Gabon, bien plus que certaines entreprises qui sont installées chez nous depuis les indépendances. Prenons l’exemple du secteur du bois. Il a fallu qu’Olam arrive pour que la transformation du bois soit effective au Gabon. Pendant combien d’années les sociétés installées ici sortaient les grumes ? Où était cette société civile pour protester ? »
C’est plutôt à l’État gabonais de mettre en place un cadre qui réponde aux normes
Et d’ajouter, « Je pense que le tout peut se discuter autour d’une table. Le gouvernement gabonais d’aujourd’hui a une certaine vision et celle-ci devrait être respectée par le partenaire Arise ou Olam. En ce qui concerne le travailleur, il faut savoir que depuis que nous parlons de la convention collective dans le secteur agricole ou dans le secteur forestier, ce dernier ne relève pas de la compétence d’une tierce entreprise. C’est plutôt à l’État gabonais de mettre en place un cadre qui réponde aux normes. C’est de la responsabilité de l’État gabonais et il faut que nous le sachions. À Nkok, il y a une direction du ministère du Travail, avec des inspecteurs du travail. Si ces derniers ne font pas leur travail, pourquoi s’en prendre à l’employeur ? Je pense que nous sommes maladroits et l’image que nous envoyons au monde, en nous attaquant à Arise qui est installé partout en Afrique, est une très mauvaise image pour le Gabon. Vous ne pouvez pas inviter des investisseurs en chassant d’autres investisseurs. Et lorsqu’on sait qu’Arise est installé au Congo Brazzaville, en RDC, au Cameroun, en Côte d’Iivoire, au Nigéria, au Ghana et un peu partout dans le monde. C’est maladroit de mettre le chef de l’État et le CTRI dans cette impasse. Un petit groupuscule de personnes, comme d’habitude, cherche à régler des comptes à gauche et à droite. Cependant, nous devons regarder l’intérêt national et à partir de là, nous trouverons des solutions adaptées et durables », préconise-t-il.
Selon M. Omva, « Il est question que l’État gabonais s’assied avec son partenaire Arise, avec la perspective de mettre en place un cadre transparent qui permette à notre pays de bénéficier encore plus des ressources et de l’expertise de son partenaire. N’oublions pas que le Gabon souffre d’un gros problème, celui du chômage. Or, nous avons en face de nous un partenaire qui est installé dans une vingtaine de pays africains, qui crée des milliers d’emplois dans plusieurs secteurs et qui est déjà installé chez nous, qui pourrait par cette bonne relation apporter encore plus au gouvernement gabonais. Voilà où est toute la question. On n’est pas dans un procès. Et s’il y en avait un, ce serait celui des anciens dirigeants. Ce sont eux qui n’ont pas été des patriotes. S’il y a des soucis aujourd’hui c’est bien parce que beaucoup ont pensé à leurs intérêts personnels ».
Le Gabon a besoin d’investisseurs, ARISE et OLAM ont prouvé leurs capacités avec de massifs investissements sur toute l’étendue du territoire national
Tout en fustigeant un esprit négativiste et opportuniste, M. Omva relève que le Gabon a besoin d’investisseurs et ARISE et OLAM ont bien prouver leurs capacités avec beaucoup d’investissements dans le pays. « J’ai comme l’impression qu’au Gabon nous ne sommes pas très conscients des réalités et que les uns et les autres veulent faire de la politique qu’autre chose. Olam et Arise sont de puissants employeurs dans notre pays, et nous avons déjà d’un côté une grande partie de la population qui n’a pas d’emploi. Si les manigances de certains mettent à genoux le partenaire, il est clair que celui-ci s’en ira, avec tous les effets que cela comporte : des milliers de personnes au chômage. Avant de démanteler un partenaire, cherchez d’abord à créer de l’emploi », conclut-il.
Pour rappel, la liste des entreprises des groupes Olam et Arise se compose de : GSEZ (38,5 % des parts détenus par la République Gabonaise et 61, 5% de parts revenant au partenaire Arise IIP), Port International d’Owendo (10,39 % des parts pour la République Gabonaise, 79, 61 % pour Arise IIP et 10 % des parts STOA infra et Énergie), Port Minéralier d’Owendo (10, 39 % des parts pour la République Gabonaise, 79, 61 % pour Arise IIP et 10 % des parts pour Meridiam- Fonds Français., Aéroport International de Libreville, co-détenu par la République Gabonaise (38, 5%) et Arise IS (61,6%)., Le partenariat avec le groupe Olam a abouti à la création de deux sociétés agricoles OLAM-Palm Gabon (Palmier à huile) et Olam-Rubber Gabon (Hévéaculture). La République Gabonaise détient 40 % des parts dans chacune de ses entreprises.