Selon la Banque mondiale, le capital humain est la pierre angulaire d’une croissance soutenue et inclusive. Dans un récent blog posté par Ioana Botea, économiste principale et Nathalie Lahire, Coordinatrice du Secteur Développement Humain, https://blogs.worldbank.org/fr/africacan/transformer-le-capital-humain-dans-la-cemac, l’institution met en exergue, la place de des connaissances, des compétences et de la santé de ses habitants
Ainsi, souligne-t-elle, dans le monde d’aujourd’hui, la richesse d’une nation ne dépend pas seulement de ses ressources naturelles, mais aussi des connaissances, des compétences et de la santé de ses habitants. Le capital humain – le potentiel collectif des individus – est essentiel à la transformation des économies africaines, et cela n’est nulle part plus évident que dans la région de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC).
L’état actuel du capital humain dans la CEMAC
Malgré son importance cruciale, le capital humain dans les pays de la CEMAC reste largement inexploité. Actuellement, un enfant né dans la région ne devrait réaliser que 37 % de son plein potentiel, contre 40 % en Afrique subsaharienne. Ces niveaux d’indice de capital humain (ICH) sont non seulement faibles, mais ils sont restés stagnants, avec peu ou pas d’amélioration entre 2010 et 2020, là où les données sont disponibles.
Cette lenteur est exacerbée par la sous-utilisation du capital humain existant. L’inadéquation de l’éducation et des soins de santé, ainsi que les faibles niveaux de compétences, ont entravé la capacité des pays de la CEMAC à tirer pleinement parti de leur main-d’œuvre. Par exemple, au cours des 15 dernières années, le capital humain n’a contribué qu’à hauteur de 2 % à la croissance totale de la République du Congo. Plus généralement, si l’on tient compte des opportunités d’emploi, une personne née aujourd’hui dans la région de la CEMAC n’a que 15 à 28 % de chances d’atteindre son plein potentiel et de devenir un membre productif de la société.
Un engagement en faveur du changement
Consciente de ce défi, la CEMAC a fait du développement du capital humain un pilier principal de sa stratégie d’accélération de la diversification économique et de la croissance. Lors du Sommet Extraordinaire d’août 2021, les chefs d’État ont donné la priorité au renforcement du capital humain, en l’introduisant dans le Programme de Réformes Economiques et Financières (PREF-CEMAC) pour la période 2021-2025. Ce programme vise à placer les ménages au centre du développement, à améliorer la gouvernance et la gestion des services, et à adopter des politiques intersectorielles à fort impact.
Les réformes sont déjà en cours, avec des initiatives ambitieuses lancées aux niveaux national et régional. Un exemple clé est la réforme en cours du système d’enseignement supérieur, qui s’articule autour de trois priorités stratégiques : le développement des compétences, l’amélioration de la qualité et l’intégration des TIC. Une université régionale avec des campus au Cameroun et au Gabon est en cours de construction et vise à devenir un centre d’excellence dans les domaines de l’agriculture, de la pêche et des sciences. L’institution devrait jouer un rôle central dans le développement du capital humain dans la CEMAC en dotant la prochaine génération des compétences nécessaires pour stimuler l’innovation et promouvoir une croissance inclusive.
Stratégies pour stimuler les investissements en capital humain
Pour transformer ces engagements en résultats concrets, les pays de la CEMAC devraient donner la priorité à deux domaines clés :
Des dépenses plus intelligentes et plus efficaces
L’inefficacité des dépenses publiques ont considérablement entravé la réalisation des objectifs politiques. Les faibles résultats de la région en matière de capital humain reflètent des problèmes systémiques profonds et un sous-investissement chronique dans l’éducation, la santé et la protection sociale. Les progrès nécessiteront des dépenses plus stratégiques, notamment la création d’un espace fiscal pour le développement humain, l’amélioration de l’efficacité budgétaire et la garantie d’une allocation plus équitable des ressources.
Des investissements plus ciblés
Les résultats en matière de capital humain varient non seulement entre les pays de la CEMAC, mais aussi à l’intérieur de ceux-ci. Par exemple, au Cameroun, l’ICH varie de 0,31 à 0,46 selon les régions, une disparité aussi grande que celle qui existe entre le Tchad et le Gabon. De même, en République du Congo, certaines régions obtiennent de moins bons résultats en matière de santé, tandis que d’autres sont à la traîne dans le domaine de l’éducation ou genre. Ces différences infranationales soulignent la nécessité d’investissements plus stratégiques et mieux adaptés aux défis propres à chaque région.
Le chemin à parcourir
L’accent mis sur le capital humain offre aux pays de la CEMAC une occasion historique de refonder le contrat social et de libérer de nouvelles perspectives de croissance. Chaque individu des pays de la CEMAC mérite le soutien et les opportunités nécessaires pour mener une vie épanouissante. Donner la priorité aux investissements dans le capital humain peut créer un cercle vertueux qui profite à la fois aux individus et à l’économie dans son ensemble. La Banque mondiale et le PREF-CEMAC se sont engagées à faire de cette vision une réalité.