Le paradoxe de la présente crise du Coronavirus est qu’elle commence par une pandémie, puis devrait certainement se transformer en une crise économique sans précédent. C’est ainsi que pourrait se décrire le mécanisme de cet enchaînement diabolique.
À court terme, le confinement des consommateurs implique un choc massif de la demande (quel consommateur en confinement envisagerait d’acheter une nouvelle voiture ou de changer son canapé ?), d’abord parce que les gens ne peuvent plus sortir, ensuite parce qu’ils ont conscience qu’ils auront des pertes massives de pouvoir d’achat et s’y préparent en stoppant net les dépenses non indispensables.
De son côté, le confinement des entreprises impose un choc de l’offre : un peu partout, les usines ferment, les magasins aussi. Ce double choc de l’offre et de la demande met en berne tous les grands indicateurs macroéconomiques : baisse massive de la consommation, chute de l’investissement… C’est le multiplicateur keynésien qui fonctionne à plein régime, mais… à l’envers ! La Chine offre un poste avancé de cette crise.
Un regard rapide sur ses indices de productions industrielle et manufacturière montre que sur l’espace d’un mois seulement, en termes de variation d’une période à l’autre, la production manufacturière a fondu de près de 20% et la production industrielle s’est écroulée. À moyen terme, d’ici quelques semaines, cette crise va entraîner une mortalité élevée parmi les entreprises, avec une sélection naturelle qui va s’accélérer en plusieurs vagues.
La première vague de faillites va toucher les entreprises directement frappées par la crise : transport aérien, événementiel, restaurant, hôtellerie, cinéma, etc. Dans un second temps, les sous-traitants de ces entreprises seront touchés à leur tour.
Car, pendant que la crise met l’activité en suspension, n’oublions pas que le compteur des intérêts financiers des dettes continue de tourner : et même si les taux d’intérêt sont faibles, les encours de dettes avant la crise étaient à un tel niveau exceptionnel que cela fonctionnera comme un piège mortel.
Par ailleurs, les frais généraux continuent eux-aussi de s’accumuler… Ce moyen terme est prévu pour durer, car le confinement ne fonctionne que s’il est prolongé aussi longtemps que nécessaire pour atteindre une immunité collective, ce qui peut prendre plusieurs mois.
A contrario, il est possible que certains pays relâchent la pression du confinement pour laisser l’économie respirer, et acceptent ainsi un peu plus de crise sanitaire pour avoir un peu moins de crise économique. Et à long terme, après la crise sanitaire ?
Bien sûr, la reprise sera là, mais de nombreux facteurs la rendront poussive, car la crise va laisser sur le carreau de nombreuses personnes, qui souffriront durablement : le niveau de consommation post-crise sera très certainement en deçà de son niveau d’avant crise.